petite cité de caractère, village médiéval aux portes des gorges du tarn

Légendes

L’horloge et la vierge

Légendes village Peyreleau

Lorsque les Peyrebelens décidèrent d’apposer une horloge sur la tour qui domine le bourg  ils demandèrent aux Roziérains de participer financièrement à l’opération.
Mais ces derniers ne l’entendirent pas ainsi et refusèrent. En conséquence de quoi les habitants de Peyreleau décidèrent d’installer ladite horloge hors du champ de vision du village d’en bas.
Or les Roziérains n’étant pas gens à s’en laisser compter, décidèrent à leur tour que lors de la reconstruction de l’église actuelle dédiée à Notre Dame des Merveilles, la vierge miraculeuse, bien que trônant sur le clocher de l’église de Peyreleau, tournerait ostensiblement le dos aux Peyrebelens et veillerait sur la destinée des Roziérains.
Ainsi Peyreleau peut se prévaloir de son horloge cependant que Le Rozier est placé sous la protection de la vierge.
Ceci, bien sûr, n’est autre qu’une histoire de clochers, mais l’air supérieur de Peyreleau ne pouvait narguer sans contrepartie le village voisin et néanmoins ami.

Le trésor du Triadou

Qu’est devenu le butin de Simon d’Albignac, pillard huguenot? L’homme, vers 1628, aurait fait main basse, près de Peyreleau, sur les coffres d’or du duc de Rohan, or destiné à financer la levée de troupes. Son château a été maintes fois sondé. En vain.

Pierre d’Albignac, IIe du nom, quitta le château de Mostuéjouls pour aller s’établir à Peyreleau. C’était un jeune homme violent, audacieux, qui ne connaissait d’autre droit que celui de la force, et qu’une vieille tradition représente comme livré à tous les débordements de la vie féodale. Le terrain qu’il avait choisi pour l’emplacement de sa demeure appartenait aux moines du Rozier de l’abbaye d’Aniane ; il s’en empara hardiment et y jeta les fondements du château du Triadou que ses descendants achevèrent. Sur ce terrain, situé près du Tarn et planté de pins, était une chapelle appelée Saint-Marlin-des-Pins, dont le nom subsiste encore, et d’où Pierre prit son armorial, trois pommes de pin .

Le prétexte de ses spoliations fut que les moines, étant obligés de fournir la barque et de payer le batelier pour le passage du Tarn, mettaient de la négligence à s’acquitter de ce devoir, et que pour s’en charger lui même, il lui fallait une indemnité. Ses procédés envers le sire de Capluc ne furent guère meilleurs, et ce ne fut qu’après la mort de ce seigneur qu’il épousa Flore sa fille.

Le château du Triadou demeura longtemps dans l’état imparfait où l’avait laissé Pierre d’Albignac (il n’avait fait bâtir que l’aile gauche). Une occasion s’offrit dans la suite à ses successeurs de continuer sa construction et voici ce qu’on raconte à ce sujet.
Les huguenots d’Alès et des Cevennes allaient de Meyrueis porter du secours aux religionnaires de Millau qui assiégeaient Creyssel, vaillamment défendu par le capitaine Arnaud de Méjanès. Ils étaient suivis de plusieurs mulets portant le riche butin qu’ils avaient fait en spoliant les églises ou en rançonnant les catholiques.

Le seigneur du Triadou (Pierre III) en fut instruit, et reçut même l’ordre d’aller leur couper le passage. Aussitôt il ramasse, du monde et va les attendre sur le Mont-Fraysse. En habile capitaine, il partagea sa petite troupe, retint avec lui les plus courageux et fit cacher les autres dans des broussailles, avec ordre de faire feu à certain signal. Tout fut ponctuellement exécuté et les huguenots pris au dépourvu tournèrent le dos et reprirent le chemin de Meyrueis. D’Albignac ordonna de poursuivre les fuyards, et en attendant le retour de sa troupe, il conduisit lui même les mulets à son château.
Bientôt après s’éleva, comme par enchantement, l’aile droite du château, et cependant tout le trésor ne fut point épuisé.

Ce qui restait fut secrètement placé sous une marche du grand escalier et le riche châtelain déposa dans ses archives qu’ un trésor était caché dans le château , mais sans indication du lieu. Sa pensée, peut-être, fut d’engager ses descendants à ne jamais abandonner une habitation où d’un jour à l’autre ils pourraient trouver une brillante fortune car il descendit dans la tombe en emportant son secret.

Ce château fut pillé par les révolutionnaires de Millau le 20 juillet 1791. Pour en venir là. Le bruit fut répandu que des mouvements sérieux se préparaient. Des envoyés de la société populaire de Millau, assurèrent aux administrateurs du département que les royalistes s’assemblaient du côté de Saint-Jean-du-Bruel, de Compeyre et de Peyreleau, ayant à leur tête MM. d’Albignac et Pourquery du Bourg ; qu’une partie des insurgés devait se rendre au camp de Jallès, dont on commençait à parler, et l’autre fondre sur Millau ; leur projet bien arrêté, disaient-ils, était de se réunir au château du Triadou, place propre par sa position à favoriser ce mouvement, et à résister même au besoin, se trouvant pourvue de canons, d’armes et de munitions de toute espèce.
Les députés insistèrent tant sur l’imminence du danger, que l’administration du département se décida à envoyer l’un de ses membres, Molinier de Sévérac, pour faire désarmer le château. Celui ci s’y rendit avec un fort détachement de patriotes millavois. On n’en approcha qu’avec de grandes précautions, et ceux des assiégeants qui n’étaient point dans le secret de l’expédition ne furent pas médiocrement surpris d’en voir les portes ouvertes, d’y pénétrer sans résistance, de n’y trouver ni armes, ni canons, ni rebelles : la seule garnison se composait d’un vieux concierge et d’un jardinier éclopé.
Or voici quel était ce secret.
La tradition du trésor caché était connue, et bien qu’on sût qu’il avait échappé jusques là aux actives recherches des seigneurs de Triadou, nul ne mettait en doute son existence. Il n’en fallut pas davantage pour enflammer le courage de certaines gens qui entrevoyaient la possibilité de mettre la main sur le trésor et de tirer de leur démonstration patriotique autant de profit que d’honneur. Le complot royaliste ne put donc surgir plus à propos.
Pendant longtemps les fouilles furent infructueuses. On désespérait déjà, quand en montant l’escalier, un coup frappé au hasard annonça une cavité. On enleva la marche, et on découvrit deux caisses de plomb qui avaient été renfermées dans autres deux caisses de chêne, mais qui étaient vermoulues. Un homme pouvait à peine porter une de ces caisses entre ses bras. Ce trésor avait été enlevé aux huguenots et les huguenots le reprirent.
On crut généralement alors à Millau que le trésor avait été trouvé et l’on nommait même ceux qui se l’étaient partagé. Deux ou trois fortunes que l’on vit surgir subitement à cette époque confirmèrent cette opinion.

Légends Chateau Triadou

L’ogre de Malbouche

Illustration Gustave Doré

Lou Grin, c’était son nom , marchand de grains de son état, vivait à Peyreleau où, selon la tradition populaire, il faisait preuve de beaucoup d’incivilités et, pour cette raison, fut chassé du village. Il alla donc se réfugier dans le ravin qui depuis porte son nom, le Ravin de Malbouche, qui, dans des temps lointains, fut un lieu de passage très fréquenté par les voyageurs qui traversaient la contrée, franchissant les escarpes du causse Méjean, puis du causse Noir.

Là, vécut Jean Grin (au lieu dit La Vaysse) dans une masure de pierres qui allait devenir son repaire et où, seule, demeure, relativement intacte, une pièce obscure accrochée aux anfractuosités de la roche et où est aménagé un four qui, dans l’imaginaire collectif, pouvait bien être à la fois l’objet du délit et la signature des forfaits qui lui ont été attribués sans doute abusivement . Toutefois Jean Grin, rejeté de la communauté, semblait s’accommoder de cette vie à l’état sauvage qu’il appréhendait au mieux, vêtu d’une peau pour, peut-on penser, mieux s’identifier aux bêtes sauvages qui, alors, peuplaient la contrée. Nous sommes vers la fin du XVIIIe siècle et, malgré la présence de nombreux loups (2000 sont recensés dans le département de l’Aveyron en l’espace de vingt-quatre ans, de 1818 à 1841) le Causse Noir semble relativement épargné. Mais « vers l’an 1799 apparut dans le pays une bête féroce qui remplit tous les habitants d’une grande frayeur. Sa taille était plus svelte que celle d’un loup. Elle était dans sa marche d’une telle agilité qu’on la voyait dans un lieu, et quatre ou cinq minutes plus tard dans un autre endroit à une lieue de distance … et malheur aux enfants qu’elle pouvait rencontrer, elle les emportait et leur dévorait, premièrement le foie et ensuite les membres.

En l’espace de six mois cette bête fit trois victimes dont un petit garçon de six ans dont on retrouva quelque membre, caché dans la terre au Ravin de Malbouche, là même où, disait-on, était le repaire de l’Ogre ». Voila comment sont consignés les faits dans le livre d’une paroisse avoisinante. Il n’en fallut pas davantage pour accuser l’Ogre de ces terribles méfaits. Dès lors une véritable expédition punitive fut montée et se solda par la capture de Jean Grin qui fût brulé vif dans un four chauffé à blanc… sauf que l’histoire éclairera ensuite la légende, les choses n’étant pas aussi simples qu’il y paraissait de prime abord !Jean Grin, mi-homme mi bête, n’était pas un simple croquemitaine qu’on invoquait pour effrayer les enfants désobéissants. Pour cela , les parents se servaient de la Dame Rouge ou de Grippet, le petit diable, ces êtres invisibles qui prenaient les tout-petits quand ils n’étaient pas sages… D’ailleurs, mieux valait ne pas en parler car raconter son histoire, c’était le faire venir nous expliquait une dame il y a encore une vingtaine d’années. Mais l’Histoire, elle, se démarque de la légende en nous apprenant que Jean Grin était un brigand, victime probablement des rumeurs les plus folles, les bruits les moins fondés en ces temps de révolution marqués par le renversement des valeurs traditionnelles et le bouleversement de l’ordre établi. Toujours est-il que, entré dans la légende, Jean Grin hante toujours le pays de ses méfaits. Et, dans la mythologie caussenarde, il représente toujours le monstre dévorant, l’ogre capable de prendre et de manger les enfants. Ce dont on est par contre certain, c’est que Jean Grin ne fut pas brulé vif car l’état civil nous apprend qu’il était présent plusieurs années plus tard au mariage de deux de ses filles.

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